Etat d’urgence en Guyane : pour quoi faire ?

mercredi 13 janvier 2016

A la différence des autres DOM, aucun élu de Guyane n’était intervenu pour soutenir l’extension de l’état d’urgence en Guyane.
A qui donc sert l’état d’urgence en Guyane

L’état d’urgence se justifie-t-il en Guyane ?, entrevue de Frédéric Farine avec le préfet, Guyaweb, 19 novembre 2015

EXTRAITS

  • Question : Concrètement – et selon France-Guyane vous l’avez-dit récemment- personne n’est inscrit à une fiche S aujourd’hui en Guyane, c’est à dire que personne n’y est identifié -après enquête- comme ayant de possibles activités de radicalisation religieuse ou terroriste…[...] Quels ont été les motifs du placement sous surveillance en Guyane d’une dizaine de personnes à la suite des actes terroristes meurtriers de janvier 2015 notamment à Charlie Hebdo ?

Réponse :[...] Les gens qui ont pu faire l’objet de surveillance sont des gens qui avaient pu déscolariser leurs enfants et/ou des gens qui se sont mis à se couper progressivement de leurs amis et de leur famille.

  • En Guyane, où il n’est pas contesté que le risque terroriste est aujourd’hui quasiment inexistant, l’instauration de l’état d’urgence ne peut-il pas avoir un effet des plus incongrus : susciter de l’incompréhension, voire créer une psychose qui n’a pas lieu d’être . Je vous donne un exemple : lorsque l’on croise à l’aéroport Félix Éboué des militaires, sans aller jusqu’à dire à à la mine patibulaire, mais armés de mitraillettes et accompagnés de berger allemands, le citoyen guyanais ne finit-il pas par se dire : tiens oui peut-être que le terrorisme, ça existe aussi chez nous…

Tous les échos que j’ai, c’est que la population guyanaise est rassurée par les contrôles. On vient de faire une saisie de 7 kilos de drogue (cocaïne, ndlr) au poste de contrôle d’Iracoubo suite à ce dispositif de contrôles renforcés.
Il n’y a que les perquisitions de nuit qui doivent être justifiées par le menace terroriste. Le reste relève des dispositions classiques relatives aux risques de trouble à l’ordre public.

  • Selon la loi relative à l’état d’urgence, c’est vous seul, préfet, qui pouvez décider les perquisitions de nuit…

C’est ça. Et je n’ai, pour ma part, que le droit d’autoriser les perquisitions de nuit. C’est l’autorité judiciaire qui a compétence en matière de saisies. Je suis donc obligé de travailler main dans la main avec l’autorité judiciaire.

  • En ce qui concerne le dispositif propre à l’état d’urgence en Guyane, quels en sont les éléments marquants ?

J’ai renforcé les mesures de sécurité sur les sites sensibles comme l’aéroport Félix Éboué. En ce qui concerne le centre spatial, il fait l’objet d’une interdiction de survol. La Chambre de commerce et d’industrie doit renforcer ses moyens de vidéo-surveillance. Avec le procureur, on sanctionnera (sic) tout propos déplacé sur les réseaux sociaux entrant dans le cadre du délit d’apologie du terrorisme.
En ce qui concerne les armes : des opérations de contrôle vont être mises en œuvre. Il y a interdiction de circuler avec des armes même dans le coffre de son véhicule, un fait courant en Guyane. J’ai mis en œuvre un pôle d’experts de la police aux frontières (Paf) afin de lutter contre la fraude aux documents d’identité notamment. Les contrôles de gendarmerie voire de la police aux frontières sont renforcés sur les aéroport dits secondaires, c’est à dire ceux de l’intérieur : Camopi, Maripasoula etc.
Par ailleurs, j’étudie la possibilité de demander au ministre, si le besoin s’en faisait sentir un jour, de faire appel aux réservistes de la police nationale et de l’armée qui ont pris leur retraite en Guyane.

  • Cela ne doit pas représenter des milliers d’hommes…

Cela représente une vingtaine de policiers et une cinquantaine de militaires. Les gendarmes ont déjà, pour leur part, un système de mobilisation de leurs réservistes. Ils sont en mesure de l’activer si nécessaire. Ils peuvent mettre en œuvre des protocoles de remise à niveau etc (…)

Par ailleurs, je ne dis pas cela spécialement contre la teneur de vos questions mais il me semble qu’il y ait consensus, tout particulièrement chez les politiques de Guyane,quant aux mesures prises.

  • Remarque du journal : aucun politique local n’avait toutefois réclamé l’extension de cet état d’urgence à la Guyane.