L’Outre-mer, laboratoire des reculs du droit des étrangers
Nouvel épisode : la loi du 16 juin 2011
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Présentation - Le régime d’exception en Outre-mer : encore et toujours ?
La loi n° 2011-672 relative à l’immigration, à l’intégration et à la nationalité du 16 juin comporte apparemment assez peu de dispositions relatives à l’Outre-mer (articles 10, 98 et 100 à 109). La partie principale a d’ailleurs été à peine abordée par les députés car très peu d’amendements avaient été déposés et, à ce stade, le temps de parole alloué à l’opposition était souvent épuisé.
Principalement à Mayotte, en Guyane, en Guadeloupe, à Saint-Barthélemy et à Saint-Martin, les étrangers sont, selon un droit dérogatoire, livrés à des contrôles expéditifs et à des reconduites sans recours suspensifs d’exécution.
Sous une apparence technique, plusieurs articles de la loi consolident, prolongent ou pérennisent ce régime d’exception. D’autres précarisent encore la procédure de demande d’asile en Outre-mer.
Le Conseil constitutionnel n’a été saisi sur le projet de cette loi que sur un point spécifique à l’Outre-mer. Le recours à des moyens audio-visuels lors des audiences de la Cour nationale du droit d’asile prévu par la loi sera optionnel en métropole mais obligatoire en Outre-mer ; est-ce compatible avec le principe d’égalité ? La Conseil a validé ce dispositif sur un fondement géographique qui laisse perplexe : "[...] la Cour nationale du droit d’asile, qui est compétente pour l’ensemble du territoire de la République, a son siège sur le territoire métropolitain ; [...] dans ces conditions, la différence instaurée entre les personnes ne trouvant sur le territoire métropolitain et les autres ne méconnaît pas le principe d’égalité" (Conseil constitutionnel, décision n° 2011-631, point 94).
Avant ce nouvel épisode, le rôle de l’Outre-mer, laboratoire de la « lutte contre l’immigration clandestine », était déjà apparu de loi en loi, depuis la loi du 29 octobre 1981 jusqu’à celle du 24 juillet 2006. Ce rôle de laboratoire des reculs des droits apparaît une fois de plus dans la loi du 16 juin 2011 et dans les débats parlementaires qui l’ont précédée.
Sous une apparence technique, plusieurs articles de la loi consolident, prolongent ou pérennisent ce régime d’exception. D’autres précarisent encore la procédure de demande d’asile en Outre-mer.
Le Conseil constitutionnel n’a été saisi sur le projet de cette loi que sur un point spécifique à l’Outre-mer. Le recours à des moyens audio-visuels lors des audiences de la Cour nationale du droit d’asile prévu par la loi sera optionnel en métropole mais obligatoire en Outre-mer ; est-ce compatible avec le principe d’égalité ? La Conseil a validé ce dispositif sur un fondement géographique qui laisse perplexe : "[...] la Cour nationale du droit d’asile, qui est compétente pour l’ensemble du territoire de la République, a son siège sur le territoire métropolitain ; [...] dans ces conditions, la différence instaurée entre les personnes ne trouvant sur le territoire métropolitain et les autres ne méconnaît pas le principe d’égalité".
Sommaire
Présentation Le régime d’exception en Outre-mer : encore et toujours ?
Chapitre 1 - Les régimes d’exception : synthèse
- I. Carte blanche aux forces de l’ordre pour éloigner les étrangers
- A. Avant la loi « Besson »
- B. Selon le projet de loi
- C. Selon Mom
- II. Des entraves spécifiques à la procédure d’asile
- A. La distance de l’OFPRA et de la CFDA
- B. Un droit au séjour restreint dans les CTOM
- C. Selon Mom
Chapitre 2 – Quelques bribes des débats de l’assemblée nationale
- I. La rétention sans le juge des libertés à Mayotte : un exemple à suivre ?
- II. Pas d’aide médicale État à Mayotte : un autre exemple à suivre ?
- III. Restreindre l’accès à la nationalité française : ballons d’essai vers la Guyane et vers Mayotte
Chapitre 3 – Le projet de loi « Besson » et l’Outre-mer : analyse
I. Applications en Outre-mer du droit commun modifié
- A. Textes applicables sur l’ensemble du territoire national
- B. L’espace où s’appliquent le Ceseda et le code du travail
La départementalisation de Mayotte n’en fait pas un DOM pour le droit des étrangers ! - C. Conséquence sur les quatre ordonnances de la suppression de deux commissions
II. Droit d’asile dérogatoire
- A. Audiences audiovisuelles de la CNDA en Outre-mer
- B. Saint-Barthélemy ou Saint-Martin : autorisation de séjour ou assignation à résidence ?
III. Une zone d’attente tout au long des fleuves frontaliers de la Guyane
IV. La reconduite à la frontière sans recours suspensif pérenne ou prolongée de 5 ans
V. La pérennisation de contrôles arbitraires de véhicules