Mayotte : arrêtés de reconduite à la frontière pour demandeurs d’asile congolais

Injonction de délivrer un récépissé de demande d’asile - TA de Mamoudzou, 12 juin 2009
vendredi 12 juin 2009

Le contexte

Depuis le début des années 2000, des demandeurs d’asile arrivent régulièrement de la région des grands lacs. Ils sont efficacement soutenus par l’association Solidarité Mayotte, membre du collectif Migrants-Mayotte.

Le 25 février 2009 la PAF interceptait un "kwassa" de près de 40 demandeurs d’asile Africains. Ils étaient alors placés en centre de rétention (car la zone d’attente n’existe que sur le papier). La préfecture leur délivrait des arrêtés de reconduite à la frontière sur le fondement desquels elle enregistrait les demandes d’asile en procédure prioritaire sans autorisation de séjour [1]

C’est cette procédure, devenue systématique, que vient de condamner le tribunal.

Le tribunal met un frein à l’imagination de la "préf", article de Rémi Carayol publié par Upanga n°4, 16 juin 2009

Rémi Carayol - Upanga n°4

Voir le site de ce bimensuel : www.upanga.com

Décision n° 0900202 du juge des référés du tribunal administratif de Mayotte, 12 juin 2009 - référé liberté enregistré le 10 juin

Selon le juge des référés :

  • L’arrêté de reconduite à la frontière est illégal

En effet, un étranger qui arrive à Mayotte et demande son admission au titre de l’asile ne peut faire l’objet d’un arrêté de reconduite à la frontière avant d’avoir présenté une demande d’admission provisoire au séjour à la préfecture ainsi que cette demande à l’OFPRA.

  • La décision d’appliquer la procédure prioritaire est illégale et porte une atteinte grave de disproportionnée à une liberté fondamentale puisque la préfecture ne justifie d’aucune des clauses de l’article L. 741-4 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile.

En conséquence :

  • Il est enjoint au préfet de Mayotte, dans le délai de 72 heures, de délivrer un récépissé de demandeur d’asile sous astreinte de 200 Euros par jour de retard ;
  • l’État versera à M. XX la somme de 800 Euros au titre des frais engagés.
TA de Mamoudzou n° 0900202

Le même jour, le tribunal prenait une décision identique sur le cas de neuf autres Congolais.

Solidarité Mayotte suit les dossiers d’une cinquantaine d’autres victimes de la même procédure.


[1Article L741-4 du Ceseda :

Sous réserve du respect des stipulations de l’article 33 de la convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés, l’admission en France d’un étranger qui demande à bénéficier de l’asile ne peut être refusée que si :

(...)

4° La demande d’asile repose sur une fraude délibérée ou constitue un recours abusif aux procédures d’asile ou n’est présentée qu’en vue de faire échec à une mesure d’éloignement prononcée ou imminente. (...)