ordonnance du 29 avril sur les LRA à Mayotte

mercredi 10 mai 2023
par  Nicole

Ordonnance obtenue à Mayotte par l’ADDE , la Cimade et le gisti , soutenus par le SAF( syndicat des avocats de France )pour "faire cesser les atteintes graves et manifesltement illégales aux libertés des personnes placées en Local de rétention administrative à Mayotte .

EXTRAITS DEMANDE DES REQUERANTS

"En ce qui concerne les atteintes graves et manifestement illégales portées aux libertés fondamentales des personnes placées dans cinq locaux de rétention
administrative créés par le préfet de Mayotte dans les locaux de la brigade territoriale de gendarmerie de Pamandzi, dans les locaux de la brigade territoriale de gendarmerie de Mamoudzou, dans l’espace désigné zone d’attente au sein du centre de rétention administrative de Mayotte, dans les locaux du service territorial de la police aux frontières de Mayotte, soit
l’espace dit « LRA STPAF », et dans les locaux du tri sanitaire de l’hôpital de Dzaoudzi."

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EXTRAITS DE L ORDONNANCE

4 Pour l’application de l’article L. 521-2 du code de justice administrative, le droit dene pas être soumis à des traitements inhumains ou dégradants, le droit au respect de la vie privéeet familiale, le droit à un recours effectif devant un juge ainsi que le droit de recevoir les traitements et les soins appropriés à son état de santé constituent des libertés fondamentales au sens des dispositions de cet article. Le caractère manifestement illégal de l’atteinte tout comme
les mesures que peut ordonner le juge des référés saisi sur le fondement de l’article L. 521-2 doivent s’apprécier notamment en tenant compte des moyens dont dispose l’autorité
7. En premier lieu, il résulte de l’instruction, d’une part, que l’interpellation
d’étrangers en situation irrégulière dont le nombre excédait la capacité maximale d’accueil du centre de rétention administrative de Pamandzi a justifié à quarante-quatre reprises l’ouverture de locaux de rétention administrative entre le 17 mars et le 19 avril 2023 pour une durée pouvant aller de deux heures à cinq jours et vingt heures. Aucun arrêté de création n’a été publié au
recueil des actes administratifs de l’Etat dans le département avant l’ouverture du local, quatre l’ont été le jour de son ouverture, qui était aussi le jour de sa fermeture, et quarante ont été publiés après la fermeture du local. Entre le 21 et le 27 avril 2023, outre un local créé àMtsapéré, douze création de locaux de rétention administrative sont intervenues par arrêtés publiés au recueil des actes administratifs les 21, 24, 26 et 27 avril 2023. Ainsi, le 21 avril ont
été publiés cinq arrêtés portant création de locaux de rétention administrative pour une durée de 24 heures, du 20 avril 14h00 au 21 avril 14h00, dans les locaux de la brigade territoriale de gendarmerie de Pamandzi, dans les locaux de la brigade territoriale de gendarmerie de Mamoudzou, dans l’espace désigné zone d’attente au sein du centre de rétention administrative de Mayotte dans les locaux du service territorial de la police aux frontières de Mayotte, dans
l’espace dit « LRA STPAF », et dans les locaux du tri sanitaire de l’hôpital de Dzaoudzi. Le 24 avril 2023 ont été publiés cinq arrêtés du 21 avril 2023 portant à nouveau création de cinq locaux aux mêmes endroits pour une durée allant du vendredi 21 avril 2023 18h00 jusqu’au lundi 24 avril 2023 14h00. Le 26 avril 2023, un arrêté du 26 avril 2023 portant création d’un local de rétention administrative dans la zone d’attente du centre de rétention administrative pour une durée allant du 26 avril 2023 à 11h30 jusqu’au 27 avril 2023 à 14h00 a été publié à 17h00. Le 27 avril 2023, un arrêté du 26 avril 2023 portant création d’un local de rétention administrative dans les locaux du service territorial de la police aux frontières de Mayotte pour une durée allant du 26 avril 2023 à 18h00 au 27 avril 2013 à 14h a été publié à 12h51.

8. Ainsi, alors que l’article L. 221-2 du code des relations entre le public et
l’administration subordonne l’entrée en vigueur des actes réglementaires « à l’accomplissementde formalités adéquates de publicité, notamment par la voie, selon les cas, d’une publication ou d’un affichage », ces arrêtés, bien que chacun indique qu’il « entrera en vigueur immédiatement à compter de sa publication », sont entrés en vigueur avant l’accomplissement des formalités requises de publicité et de manière rétroactive. Cette pratique fait obstacle au
contrôle effectif des conditions de rétention dans ces locaux par le procureur de la République et le Contrôleur général des lieux de privation de liberté alors que ceux-ci sont chargés de veiller à ce que les conditions de rétention garantissent l’exercice effectif de leurs droits par les personnes retenues. Cette pratique fait également obstacle à la présence de l’association Solidarité Mayotte, chargée à Mayotte d’assister les personnes placées en rétention
administrative en application de l’article R. 744-21 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, dès lors que celle-ci ne peut prendre aucune mesure d’organisation de son activité faute d’être informée en temps utile de la création de ces locaux. Enfin, il n’est pas contesté que cette pratique fait obstacle à ce que les indications fournies par les personnes
retenues permettent à leurs familles ou leurs conseils d’identifier le lieu même de leur rétention.
9. D’autre part, les dispositions déjà citées du 9° de l’article R. 761-5 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile prévoient que les locaux de rétention administrative créés à Mayotte disposent « d’équipements permettant l’exercice effectif de leurs
droits par les intéressés, notamment un téléphone en libre accès ». Il résulte toutefois dedroits par les intéressés, notamment un téléphone en libre accès ». Il résulte toutefois de l’instruction que l’accès libre à un téléphone n’est pas assuré en pratique dans les lieux de rétention administrative en litige même si leurs différents règlements intérieurs prévoient, en leurs articles 14 ou 15, que les personnes retenues ont « accès gratuitement à un téléphone » ou qu’un téléphone portable « est à la disposition des étrangers pour appeler en France et à l’étranger ». À cet égard, si le préfet de Mayotte fait valoir en défense que dès lors que les dispositions du 9° de l’article R. 761-5 évoquent « notamment » un téléphone en libre accès, ce moyen de télécommunication n’est pas nécessairement le seul possible et qu’il n’est pas démontré que les étrangers placés dans un local de rétention administrative n’auraient pas accès
à un canal de communication pour prévenir leurs proches ou tout autre personne de leur choix, il ne fait lui-même mention d’aucun autre canal de communication dans ses écritures ou à la barre tandis que les règlements intérieurs des locaux ne prévoient eux-mêmes aucun autre moyen de communication. L’accès libre à un téléphone permettant de passer au moins un appel en France ou à l’étranger est donc indispensable pour permettre aux personnes retenues d’exercer effectivement leur droit à un recours devant un tribunal.
10. Il résulte de ce qui précède que les associations et le syndicat requérants sont fondés à soutenir que les conditions de rétention dans les locaux de rétention administrative régulièrement créés par le préfet de Mayotte dans les locaux de la brigade territoriale de gendarmerie de Pamandzi, dans les locaux de la brigade territoriale de gendarmerie de Mamoudzou, dans l’espace désigné zone d’attente au sein du centre de rétention administrative de Mayotte dans les locaux du service territorial de la police aux frontières de Mayotte, dans
l’espace dit « LRA STPAF », et dans les locaux du tri sanitaire de l’hôpital de Dzaoudzi ne permettent pas aux personnes retenues de contester utilement leur éloignement et leur placement en rétention administrative et portent ainsi une atteinte grave et manifestement illégale au droit d’exercer un recours effectif devant une juridiction."

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"Il y a lieu, dès lors, de prescrire les mesures de nature à faire disparaître les effets des atteintes graves et manifestement illégales au droit d’exercer un recours devant une juridiction qui ont été,exposées aux points 7 à 10 de la présente ordonnance.
En ce qui concerne les mesures nécessaires à la sauvegarde d’une liberté fondamentale
15. Eu égard à la vulnérabilité des personnes retenues au sein d’un lieu de rétention administrative et à leur situation de dépendance vis à vis de l’administration, il appartient à celle-ci, et notamment au préfet territorialement compétent et aux responsables de ces lieux, de prendre les mesures propres à garantir le respect effectif des libertés fondamentales énoncées au point 4."

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"ORDONNE :
Article 1er : Il est enjoint au préfet de Mayotte de créer, à titre provisoire mais de manière continue, quatre locaux de rétention administrative dans les locaux de la brigade territoriale de gendarmerie de Pamandzi, dans les locaux de la brigade territoriale de gendarmerie de Mamoudzou, dans les locaux du service territorial de la police aux frontières de Mayotte, dans l’espace dit « LRA STPAF », et dans les locaux du tri sanitaire de l’hôpital de Dzaoudzi jusqu’au 23 juin 2023 à 19h00 et de reporter la date de fermeture du local de rétention
administrative créé au sein du centre de rétention administrative de Mayotte dans l’espace désigné zone d’attente au 23 juin 2023 à 19h00.
Article 2 : Il est enjoint au préfet de Mayotte de prendre les mesures techniques nécessaires pour permettre aux personnes retenues dans les locaux de rétention administrative visés à l’article 1er d’avoir accès à un téléphone leur permettant de passer au moins un appel de leur choix en France gratuitement ou à l’étranger pour un coût modeste.
Article 3 : Il est enjoint au préfet de Mayotte de se rapprocher de l’association Solidarité Mayotte pour évaluer avec elle les aménagements devant être mis en oeuvre pour lui permettre d’exercer effectivement sa mission d’assistance dans l’ensemble des locaux de rétention administrative créés à Mayotte."


https://www.gisti.org/spip.php?article7012

Documents joints

PDF - 296.2 kio
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