Communiqué du Groupe d’Appui aux Rapatriés et Réfugiés - GARR
18 Décembre : Célébration de la Journée Internationale des Migrants-es
La situation d’Haïti a de graves conséquences sur les Haïtiens/Haïtiennes à l’étranger
A l’occasion du 18 décembre, Journée Internationale des Migrants-es, consacrée aux personnes qui vivent en dehors de leur pays, le GARR veut attirer l’attention sur l’impact négatif de la situation prévalant en Haïti sur les Migrants-es Haïtiens à travers le monde. Les récents événements politiques joints à l’épidémie du Choléra apparue à la mi-octobre, ont renforcé la discrimination et les préjugés à l’encontre des Haïtiens de divers pays en particulier, en République Dominicaine.
A titre d’exemple, un syndicat de transport public Dominicain a déclaré sans ambages qu’il ne transportera pas de ressortissants-es haïtiens avec ou sans documentation. Le 9 Décembre 2010, c’est avec fracas que des militaires Dominicains de concert avec des représentants du Ministère de la Santé, ont délogé plusieurs dizaines de commerçantes Haïtiennes avec leurs marchandises exposées dans des marchés publics de la province d’ELIAS PIÑA, a rapporté la Presse Dominicaine. Sous prétexte de lutte anti-choléra, des Haïtiens/Haïtiennes se retrouvent donc victimes de violations de leurs droits comme la liberté de circulation, la liberté de commerce et le droit au travail.
Par ailleurs, des témoignages recueillis par le GARR auprès de migrants-es Haïtiens établis dans plusieurs pays expriment leur grande souffrance face aux images télévisées en provenance d’Haïti et à travers la lecture d’articles sur l’actualité haïtienne. Bon nombre d’entre eux, ne cachent pas avoir honte dans la rue et sur les lieux de travail, à se présenter comme citoyens ou citoyennes haïtiens parce que cette question revient invariablement, nous avons recueilli des témoignages de personnes âgées ayant laissé le pays depuis très longtemps et qui rêvaient de passer leurs vieillesse en Haïti ; cependant, petit à petit ils abandonnent cette idée, car la situation du pays les effraient. Signalons que durant ce mois de décembre, beaucoup d’Haïtiens/Haïtiennes qui avaient projeté de passer les fêtes de fin d’année au pays avec leur famille, ont commencé à annuler leur réservation. Il faut aussi mentionner les graves conséquences du tremblement de terre du 12 janvier sur la diaspora estimée à un tiers de la population Haïtienne. Lors du séisme, des Haïtiens/Haïtiennes venus passer leurs vacances avec des membres de leur famille, ont, ou bien perdu la vie, ou ont vu périr des proches. Nous tenons à saluer leur mémoire en la circonstance. Il importe de signaler les pertes matérielles subies par les membres de la diaspora durant la catastrophe : beaucoup d’immeubles effondrés avaient été financés par ces ressortissants-es Haïtiens au travers de maintes difficultés et privations.
En outre, après le tremblement de terre, c’est dans la diaspora qu’un grand nombre de personnes avaient pris refuge pour une brève ou une longue période. Des Haïtiens/Haïtiennes établis aux États-unis d’Amérique, au Canada, en République Dominicaine et ailleurs, ont accueilli des rescapés-es blessés ou sous le choc. Beaucoup de ces réfugiés sont dépourvus de permis de résidence et de travail. Ils/Elles ne bénéficient pas non plus d’un support dans le pays d’accueil comme la disposition dénommée TPS octroyée par le gouvernement américain et réservée aux immigrés d’avant le 12 Janvier. Ces Haïtiens/Haïtiennes se retrouvent donc à la charge de leur famille qui souvent n’a pas de grand moyen.
En dehors de la situation haïtienne qui affecte les ressortissants haïtiens de l’extérieur, ces Migrants-es sont aux prises avec leurs problèmes spécifiques dans le pays d’accueil. A titre d’exemple, aux Iles turks & Caicos , dans la Caraïbe, les Migrants-es haïtiens se sentent abandonnés en raison de l’absence de représentants de l’État haïtien sur place pour leur offrir les services dont ils ont besoin comme la délivrance d’un passeport. Dans cet Archipel britannique, ils/elles se retrouvent sans défense, alors qu’ils sont l’objet d’abus, d’arrestation, et d’emprisonnement dans de mauvaises conditions.
Quant aux Migrants-es haïtien-ne-s vivant dans les territoires français d’outre mer, en particulier, en Guyane, l’obtention d’une documentation pour travailler dans ce pays ou faire venir un parent d’Haïti, reste une course d’obstacles. Les belles promesses du Gouvernement français relatives aux facilités liées à la réunification des familles après le séisme, ne se sont guère concrétisées. Au contraire, la procédure pour l’obtention d’un visa s’est compliquée. Les difficultés sont devenues tellement aiguës qu’un regroupement d’associations franco-haïtiennes, le Collectif Haïti de France, a jugé bon de lancer un cri d’alarme aux autorités Françaises et Haïtiennes.
Au moment le monde entier célèbre le 20ème anniversaire de la Convention Internationale sur la protection de tous les travailleurs Migrants et des membres de leur famille, le GARR lance un appel à tous les acteurs en Haïti pour qu’ils s’efforcent d’offrir une autre image d’Haïti au monde. Cela contribuera à recréer chez les Haïtiens/Haïtiennes de l’extérieur, un sentiment de fierté vis-à-vis de ce coin de terre où ils/elles sont nés.
Le GARR profite de l’occasion pour formuler les recommandations suivantes :
- Étant donné le rôle de la diaspora dans la vie nationale, il importe de lui offrir la possibilité d’une plus grande participation dans la reconstruction du pays. Actuellement les ressources haïtiennes sont nombreuses en terre étrangère. Si des efforts sont consentis pour les associer aux ressources locales, nous pourrons commencer à trouver la solution à nos problèmes.
- Dans les communautés à forte concentration d’Haïtiens comme dans les territoires français : aux Iles Turks, Caicos et en République Dominicaine, nous recommandons l’installation de consulats dynamiques aptes à fournir aux ressortissants-es haïtiens les services dont ils/elles ont besoin, notamment au niveau de l’état civil.
A l’avènement d’un gouvernement et d’un parlement fonctionnels, le GARR recommande la ratification de la Convention Internationale sur la protection de tous les travailleurs Migrants et des membres de leur famille. Il est regrettable que l’État haïtien qui compte aujourd’hui plus de 3 millions de ces ressortissants-es à l’étranger, n’a pas encore ratifié cette Convention, 20 ans après son adoption par l’Organisation des Nations Unies.
Enfin, à l’occasion du 18 Décembre, Journée Internationale des migrants-es, le GARR tient à rappeler à toutes et à tous, en particulier à nos dirigeants qu’aujourd’hui le peuple haïtien ne se limite pas au 10 millions de personnes qui vivent sur le territoire. il faut prendre en compte des 3 millions de ressortissants-es haïtiens à l’étranger et qui pour des raisons diverses, avaient émigré. Nous devons donc bien réfléchir à toutes les actions que nous réalisons en Haïti, car, chaque geste accompli à tort peut entraîner de graves conséquences sur la vie, l’économie et l’image des Haïtiens/Haïtiennes de l’extérieur.