Pas d’entrée dans l’Union des Comores sans état civil : étonnant ?

Instruction du 15 mars, quinze jours de tension, commentaires
vendredi 25 mars 2011

Circulation inter-îles : un document d’état civil est obligatoire - le décret

Le directeur national de la sureté du territoire, commissaire général de police Abou Achirafi Bacar, a signé une note de service, le 15 mars dernier pour mettre en application la décision du conseil des ministres en date du 9 février 2011, exigeant aux avions et bateaux transportant des passagers de vérifier si ces derniers sont porteurs de pièces d’identité. Les vérifications s’effectueront à l’entrée comme à la sortie des postes frontières des Comores pour des raisons de sécurité.
« A ce titre, la direction générale de la police rappelle aux agences qu’aucun
passager ne sera accepté à embarquer ou à débarquer aux ports et aux
aéroports s’il n’est détenteur de sa pièce d’identité. »
Cette mesure vise à sécuriser les îles, et empêcher les personnes recherchées pour des délits graves de trouver refuge dans les îles en se confondant avec la population. Ces dernières années, des personnes poursuivies de génocide au Rwanda ont trouvé refuge à Mayotte espérant joindre l’occident par cette voie.
Cette mesure, empêchera désormais le bateau Maria Galanta de déposer
toutes les semaines les comoriens refoulés de Mayotte, sous prétexte qu’ils
n’ont pas de titre de séjour aux Comores. Son application stricte mettra fin
aux drames humanitaires qui se déroulent à Mayotte, avec les expulsions
musclées

A compter de ce vendredi 18 mars, les autorités comoriennes ont annoncé officiellement qu’elles n’accepteraient plus les reconduites sur leur territoire en provenance de Mayotte, de personnes ne possédant pas de papiers d’identité. Depuis plusieurs semaines, le gouvernement de l’union des Comores s’échine à déstabiliser l’arrivée du département et après en avoir appelé au « patriotisme » de la presse nationale, le président Sambi a lancé cette ultime attaque. La nouvelle a été confirmée par le bureau de la préfecture jeudi soir et si l’on sait qu’une réunion de crise a été organisée, le préfet Hubert Derache n’a souhaité faire aucun commentaire sur cette situation. C’est un décret officiel des Comores qui a été rendu applicable à compter de ce 15 mars. Plusieurs explications peuvent être avancées, à commencer par la plus importante : l’érection de Mayotte au statut de département à compter du 31 mars.

Mais s’ajoutent également l’extradition du Comorien Ahmed Lothar, sous le coup d’un mandat d’arrêt international émis par le juge Karki. Interpellé à Madagascar en janvier dernier, il a été extradé vers Mayotte alors que les Comores avaient elles aussi réclamé son extradition, et Sambi avait lui-même fait le déplacement à Madagascar, en vain. Enfin, cette semaine, l’annulation de la visite de Sambi à la Réunion en raison d’un refus de visa n’a pas arrangé les relations diplomatiques entre la France et les Comores. Le problème majeur que pose ce nouveau décret est évidemment l’expulsion de personnes en situation irrégulière à Mayotte. Il sera très simple pour eux d’éviter la reconduite aux frontières en se débarrassant de tout papier d’identité. Le commissariat de Mamoudzou a d’ores et déjà annoncé que des mesures seraient prises pour renforcer les rondes de surveillance, craignant une montée de la délinquance.


Quinze jours de tension

Articles en ligne sur le site de Malango actualité ; un abonnement à "Malango actualité" est gratuit.

  • Comores - La tension monte entre Moroni et Paris
    Malango actualité (20 mars)
    Par Ahmed Abdallah Mguéni

Le 15 mars dernier, une note de service émise par le ministère comorien de la défense est venue en premier faire monter la mayonnaise. Cette note indique que « une pièce d’identité est exigée à tout passager empruntant un avion ou un bateau à l’entrée comme à la sortie des postes frontaliers des Comores pour des raisons de sécurité ». Ce message d’apparence anodin, ne l’est pas pour autant. La note signée par le directeur de la sûreté du territoire est destinée aux compagnies aériennes comme maritimes qui desservent Mayotte et qui sont susceptibles de transporter des personnes expulsées de cette île. En clair, il est fait interdiction à ces compagnies de ramener les Comoriens des trois îles, refoulés de Mayotte vers Anjouan.
La réaction de Paris ne s’est pas fait attendre. Dans un communiqué de presse publié samedi dernier, l’ambassade de France à Moroni « regrette cette décision unilatérale », dans un premier temps. Et la représentation diplomatique française va encore plus loin en menaçant que « dans le cas où les autorités comoriennes appliqueraient leur décision, la France mettra en œuvre toutes mesures de restriction dans la délivrance des visas pour les ressortissants comoriens à destination du territoire français ». Interrogé sur la signification exacte des « restrictions », l’ambassadeur de France qui parle de « mesure de rétorsion », indique que « les détails seront donnés au moment opportun ».
Cette tension est sans doute une conséquence de la décision française de faire de Mayotte un département français. Le gouvernement avait promis une riposte. Les observateurs ne dissocient pas cette nouvelle tension entre Paris et Moroni et le report du voyage que le président comorien devait réaliser la semaine dernière vers l’île de la Réunion.

  • Comores- Les autorités comoriennes interdites de visas d’entrée en France
    Par Ahmed Abdallah Mguéni
    Vendredi 25 Mars 2011 à 05:30:10 - Diplomatie - Relations internationales

Dans une note envoyée lundi, la France annonce au ministère des affaires étrangères que son service consulaire « ne recevra pas des passeports diplomatiques comoriens, ni de passeports de service », jusqu’à nouvel ordre.

Le 15 mars dernier, une note de service émise par le ministère comorien de la défense est venue en premier faire monter la mayonnaise. Cette note indique que « une pièce d’identité est exigée à tout passager empruntant un avion ou un bateau à l’entrée comme à la sortie des postes frontaliers des Comores pour des raisons de sécurité ». Ce message d’apparence anodin, ne l’est pas pour autant. La note signée par le directeur de la sûreté du territoire est destinée aux compagnies aériennes comme maritimes qui desservent Mayotte et qui sont susceptibles de transporter des personnes expulsées de cette île. En clair, il est fait interdiction à ces compagnies de ramener les Comoriens des trois îles, refoulés de Mayotte vers Anjouan.
La réaction de Paris ne s’est pas fait attendre. Dans un communiqué de presse publié samedi dernier, l’ambassade de France à Moroni « regrette cette décision unilatérale », dans un premier temps. Et la représentation diplomatique française va encore plus loin en menaçant que « dans le cas où les autorités comoriennes appliqueraient leur décision, la France mettra en ½uvre toutes mesures de restriction dans la délivrance des visas pour les ressortissants comoriens à destination du territoire français ». Interrogé sur la signification exacte des « restrictions », l’ambassadeur de France qui parle de « mesure de rétorsion », indique que « les détails seront donnés au moment opportun ».
Cette tension est sans doute une conséquence de la décision française de faire de Mayotte un département français. Le gouvernement avait promis une riposte. Les observateurs ne dissocient pas cette nouvelle tension entre Paris et Moroni et le report du voyage que le président comorien devait réaliser la semaine dernière vers l’île de la Réunion.

  • Comores - Immigration clandestine : de la parole aux actes
    par Kamal Ali Yahoudha
    Malango actualité (23 Mars 2011)

14 reconduits à la frontière en provenance de Mayotte vers Anjouan, ont été (re-) reconduits à Mayotte mardi soir par le même bateau « Princesse Caroline ». Il leur manquait des pièces d’identités qui justifient leur nationalité comorienne. Pièce désormais obligatoire pour circuler sur le territoire comorien. Au départ comme à l’arrivée. Dans le groupe des personnes refoulées, deux enfants ont subi le même traitement au port de Mutsamudu et pourtant, ces (re-) reconduits avaient présenté, selon un marin du ’’Princesse Caroline’’, des extraits de naissance à la place des fameuses nouvelles cartes d’identité biométriques.
Depuis quelques jours, une note du Directeur Général de la Sureté du territoire circule et exige que « tout passager empruntant un avion ou un bateau à l’entrée et à la sortie des postes frontières » présente une pièce d’identité, faute de quoi, la personne se verra refoulée du territoire.
Cette décision, prise en conseil de ministre la semaine dernière, fait partie d’une batterie de mesures prises par les autorités comoriennes dans le cadre d’un « plan de riposte » à la départementalisation de Mayotte. Un Comité National de Riposte a même été créé par les autorités comoriennes en association avec des associations de la société civile pour dénoncer « l’occupation illégale » de Mayotte par la France.
La décision fait l’unanimité et est accueillie comme étant l’unique moyen de pression efficace envers la France. Cette « redoutable arme » de riposte est souvent brandie par les autorités comoriennes, le temps d’une crise d’humeur passagère comme çà a été le cas après le débarquement d’Anjouan en mars 2008 pour déloger Mohamed Bacar. Une crise s’en était suivie après sa fuite vers Mayotte.
Il a fallu que la France hausse le ton, mette en place le GTHN et bien évidemment octroie quelques largesses pécuniaires envers l’état comorien pour que ce dernier décide de lever l’interdiction des reconduites à la frontière des « sans papiers ». La polémique était née après que le Ministre des Affaires Étrangères de l’Union des Comores de l’époque ait tenté de justifier la levée de cette interdiction. Selon lui, la France est le premier partenaire financier des Comores et tout un chapelet d’arguments avait été avancé pour n’être perçu par les comoriens que comme un signe d’impuissance du gouvernement comorien face à une France qui a tous les atouts pour mettre à mal le pays en cessant ses aides. Pour ne pas avoir à s’expliquer d’avantage sur les dessous de ce revirement, le dossier avait été rapidement bouclé sous le sceau de « Raison d’Etat ».
Et voici encore, à l’approche du 31 mars, date de la départementalisation officielle de Mayotte, que les autorités comoriennes décident d’organiser une manifestation internationale le 25 mars pour dénoncer ce changement de statut de Mayotte avec une série de mesures dites de « riposte » contre la France à l’instar de l’exigence d’une pièce d’identité à toute personne qui reviendrait de Mayotte. Car il est clair que cette note de la Direction Générale de la Sûreté du Territoire a pour objectif de donner du fil à retordre aux autorités françaises. Lesquelles n’ont pas tardé à montrer leurs muscles. L’ambassade de France aux Comores a immédiatement publié un communiqué avec comme intention de mettre en œuvre « toutes mesures de restriction dans la délivrance des visas pour les ressortissants comoriens à destination du territoire français. »
Les Comoriens restent toutefois septiques quant à la durée du bras de fer. Sachant que « le gouvernement comorien lèvera sans délais cette mesure. Nous avons l’habitude. Notre gouvernement nous crée des problèmes plus qu’il n’en a jamais résolus. C’est regrettable car ce n’est pas nos autorités qui sont victimes des mesures de réciprocité, mais le citoyen lambda. Regardez, nos frères sont devenus des balles de ping-pong », nous disait, au port de Mutsamudu, une dame venue accueillir un proche (re) expulsé vers Mayotte mardi.
A ceux qui croyaient que c’était de la « poudre aux yeux », la Police de l’Air et des frontières comorienne joint la parole aux actes.

  • Les Comores ont symboliquement dénoncé la France
    Par Ahmed Abdallah Mguéni
    Malango actualité (Lundi 28 Mars )

Samedi quelques milliers de personnes se sont réunies au palais du peuple pour dénoncer « l’occupation illégale » de la France à Mayotte. Les autorités comoriennes en tête, ont rappelé à l’ancien colonisateur la « comorianité » de cette île restée entre ses mains. Le président intérimaire a réitéré la position comorienne tout en lançant un appel aux frères mahorais.

La grande salle du palais du peuple était trop petite ce samedi à l’occasion de la journée de solidarité organisée par les autorités comoriennes pour dénoncer « l’occupation illégale de Mayotte par la France ». Signe que toutes les couches sociales étaient unies dans cette cause, les notables ont ouvert le bal par une allocution de l’ancien ministre des affaires étrangères, Said Hassane Said Hachim. Ce grand commis de l’Etat rassure l’assistance « qu’il ne faut pas beaucoup s’inquiéter car bientôt les mahorais, eux-mêmes viendront se joindre à nous pour demander le départ du colonisateur français ». Cet ancien gouverneur de Grande Comore, affirme que « s’ils sont toujours de mèche avec lui aujourd’hui c’est parce qu’ils ne connaissent pas les conséquences de la départementalisation ».
La cérémonie a commencé par une lecture des résolutions des Nations et de l’Union Africaine qui certifient l’appartenance de Mayotte à l’ensemble comorien. Des résolutions qui sont régulièrement « violées par la partie française » par le principe de la loi du plus fort. C’est pourquoi le président Sambi se demande « comment ces organisations auraient-elles pu admettre ce membre fondateur de l’Onu, ce grand pays connu pour son attachement au respect du droit international, ce grand pays que nous considérons encore comme ami de l’Afrique et de l’Union des Comores puisse continuer en 2011 à bafouer d’une façon aussi flagrante les résolutions de l’Onu et les décisions de l’Union Africaine ? » Cette même interrogation est posée par Idriss Mohamed du comité Maoré. « Comment comprendre et tolérer que la France, membre permanent du Conseil de Sécurité, ne respecte pas le principe de l’intangibilité des frontières au moment de l’accession des pays à l’indépendance, un principe fondateur de l’Organisation des Nations Unies ? », se demande le responsable de cette organisation engagée pour « le retour de Mayotte dans son giron naturel ».
Ahmed Abdallah Sambi a profité de l’occasion pour relancer sa proposition de « un Etat deux administrations » qui voudrait que la France continue à administrer Mayotte pour une durée bien déterminée tout en reconnaissant la souveraineté comorienne sur cette île. Cette solution proposée par la partie comorienne est toujours restée sans réponse du côté français. Le président n’a pas qu’attirer l’attention de la France. Sambi en a également appelé à l’Union Européenne pour «  qu’elle ne cautionne en aucun cas, l’occupation illégale d’une partie d’un territoire d’un pays souverain. Ce serait là un précédent dangereux porteur de menace aujourd’hui comme demain pour la paix, la sécurité et la stabilité dans le monde et dans cette partie de l’Afrique et de l’océan indien en particulier ». Le ministre des relations extérieures a lui aussi lancé un cri à l’endroit de la communauté internationale en assurant que « les Comores, nous ne pouvons qu’il ait une application à géométrie variable du droit international ».
Au cours de cette cérémonie, on a compris que cette lutte ne pouvait être menée sans les Mahorais eux-mêmes qui sont « plus attirés par la manne financière que l’occupant injecte chaque année dans l’île ». C’est pourquoi, le président comorien a tendu la perche. « Vos frères et sœurs des trois autres îles, n’ont à leur égard aucune animosité, aucune haine, aucun mépris. Les divergences politiques ne peuvent en aucun cas effacer des liens séculaires de sang, une géographie, une religion, une histoire, une culture et une langue unique qui ont toujours constitué l’archipel des Comores », martèle le président comorien sous une pluie d’applaudissement.

L’actualité et la tension qui règnent entre Paris et Moroni n’ont pas manqué ce rendez-vous. Idriss Mohamed estime que « chacun de nous se sent humilié par l’attitude inqualifiable de l’ambassadeur de France aux Comores. Comment peut-on tolérer qu’au moment même où la France célèbre son annexion de l’île comorienne de Mayotte, son ambassadeur chez nous menace notre pays et soumette nos dirigeants à un chantage lamentable sur un visa ? Et pourquoi tant d’agressivité ? Pour une mesure administrative banale. N’est ce pas un minimum que de demander aux personnes se présentant aux frontières, une pièce d’identité ! Est-ce là un crime abominable qui vaut à notre pays un tel déchainement de violence de la part de l’ambassade de France aux Comores ».

  • Des pays amis des Comores à l’attaque
    Par Ahmed Abdallah Mguéni
    Malango actualité (Lundi 28 Mars)

On avait annoncé une vingtaine de pays qui devait arriver à Moroni à l’occasion de la journée de solidarité. Finalement, seules les représentations diplomatiques accréditées en Union des Comores ont pris la parole au palais du peuple pour marquer leur soutien à l’Etat comorien face à « ce coup de force de la France ». De tous les discours, c’est celui de l’ambassadeur libyen qui a le plus marqué les esprits. Celui qui a un autre litige avec la France n’a pas mâché ses mots. D’entrée, le diplomate libyen indique « qu’il est devenu une honte maintenant de parler français. Mais, dit-il, il est nécessaire de parler cette langue pour que le message arrive à destination. La France essaye de voler non seulement Mayotte aussi notre langue et notre culture ». Et l’ambassadeur libyen excité par une assistance entièrement acquise à sa cause, condamne. « Je voudrais fortement confirmer que toutes les mesures prises par la France sont nulles et non avenues », martèle le diplomate de la Jamahiriya. L’ambassadeur de Kadhafi ne pouvait manquer de faire le lien avec la situation dans son pays. « Prétendant appliquer les résolutions du conseil de sécurité, cette France elle-même, l’Etat hors de droit et la légitimité internationale continue d’ignorer les conventions et la légitimité internationale qui confirme que Mayotte fait partie intégrante de l’archipel des Comores », poursuit-il avant d’affirmer que de dire « le pire des colonisations que l’Afrique a connu, c’est la colonisation française ».
L’Afrique du Sud a elle aussi montré son attachement à l’intégrité territoriale des Comores. Son tout nouvel ambassadeur affirme que « la république d’Afrique du sud est attachée à l’unité territoriale et la souveraineté des Comores » et Johannesburg demande « l’engagement d’un dialogue francs sous l’égide des Nations Unies » dans le but de trouver une solution à ce litige qui oppose la France aux Comores. Tout en demandant aussi un dialogue entre les deux pays, la Chine dans un ton un peu léger, a d’abord « pris note de la proposition du président comorien d’un Etat deux administrations ». L’ambassadeur chinois à Moroni annonce que « la partie chinoise estime que le problème de Mayotte, est un problème légué par l’époque coloniale ».
De son coté, l’Union Africaine n’a pas dérogé à la règle. « Le soutien de l’Union Africaine en faveur du recouvrement de la souveraineté comorienne de Mayotte demeure indéfectible car conforme au principe inaliénable du respect de la souveraineté internationale des Etats africains et l’intangibilité des frontière issues de la colonisation qui guide son action en faveur de la paix et la stabilité », rappelle Mourad Taiate, chef du bureau de liaison de l’UA à Moroni. Et le diplomate africain d’ajouter que « le processus de départementalisation de Mayotte est immoral. Il l’est d’abord humainement, au regard des nombreuses victimes qui périssent chaque année en tentant de rejoindre une partie confisquée de leur pays. Il l’est d’avantage, parce qu’il s’éloigne fondamentalement des valeurs universelles, de droits de l’Homme et du respect des droits humains auxquels la communauté internationale a profondément souscrit. A ce titre, il faut le condamner », renchérit Mourad Taiati. D’autres pays comme le Sénégal ou l’île Maurice n’ont pas pu participer mais ont aussi envoyé des messages de soutien. C’est le cas de la Commission de l’océan Indien.

  • Le dialogue bloque entre la France et les Comores et la tension monte
    Par Ahmed Abdallah Mguéni
    Malango actualité (Lundi 28 Mars)

Le début des négociations qui étaient engagées entre l’ambassade de France et le gouvernement comorien ont connu un coup d’arrêt. Tout a capoté au moment de signer le document final. Chacun impute la responsabilité de cet échec à l’autre.
La fin de la tension née il y a une dizaine de jours entre Paris et Moroni n’est pas pour aujourd’hui. Les pourparlers qui étaient en cours entre le gouvernement comorien et l’ambassade de France n’ont pas pu aboutir. Un projet d’accord né des premières discussions devait être signé entre les deux parties dimanche. Mais la signature a été reportée à la dernière minute, faute d’un consensus sur le document final. Dans un communiqué publié dimanche, l’Ambassade de France indique que « le gouvernement comorien a, une fois encore, préféré reporter cette signature et remettre ainsi en question le résultat de ces discussions constructives ». La représentation diplomatique française à Moroni ajoute « qu’elle exprime sa vive préoccupation face à ce revirement, qui semble témoigner que sa volonté de trouver rapidement un compromis satisfaisant pour les deux parties n’est pas partagée ». Pour expliquer ce report, le gouvernement comorien par la voix du ministre des affaires étrangères, assure que « l’ambassade de France a transmis un rapport de réunion que nous avons estimé ne pas être conforme à la nature de nos préoccupations. Nous avons transmis notre rapport. Manifestement ça a déplu ». Avec deux visions aussi opposées, ce projet est loin de fédérer les deux parties.
Les deux parties s’accusent mutuellement d’être à l’origine de ce report. L’ambassade de France « regrette l’attitude dilatoire du Gouvernement comorien, au moment même où un accord était en vue qui aurait permis de sortir d’une crise qui ne bénéficie à aucune des parties. Elle réaffirme sa volonté d’atteindre, au plus tôt, cet objectif par un dialogue véritablement sincère et responsable ». Ce passage du communiqué de l’ambassade de France a manifestement choqué la diplomatie comorienne. « On a dit non, c’est pourquoi c’est dilatoire. Cela ne me surprend plus venant des fonctionnaires de l’ambassadeur de France. Le vocabulaire de l’ambassade de France heurte notre dignité. Je leur laisse l’entière responsabilité de ces affirmations », déclare le monsieur Diplomatie du gouvernement comorien.
En tous cas, ce report a fait encore monter la tension d’un cran. L’ambassade de France a durci les sanctions qui pèsent contre l’Etat comorien et ses ressortissants. « L’Ambassade de France se voit malheureusement contrainte d’étendre, dès le lundi 28 mars, la suspension de la délivrance de visas pour le territoire français à tous les types de passeports, sans préjudice d’autres mesures qui pourraient être prises dans les prochains jours », lit-on dans ce communiqué. Me Fahmi Saïd Ibrahim, ministre des relations extérieures, affirme que « le gouvernement comorien prend note de la décision de ce grand pays qui est la France » mais «  regrette que les Comores soient sanctionnées parce qu’elles ont appliqué le droit international, cela en protégeant ses ressortissants et en luttant contre la piraterie dans la région ».
Par rapport à cette nouvelle décision de la France, le gouvernement pourrait réagir ce mercredi en conseil des ministres.

  • Comores - Me Mzimba accuse la « politique suicidaire » du gouvernement Sambi
    Par Ahmed Abdallah Mguéni
    Malango actualité (Jeudi 31 Mars)

L’exigence d’une pièce d’identité à l’entrée des passagers aux frontières par le gouvernement comorien est considérée comme « une déclaration de guerre contre la France » par l’avocat Mzimba. Ce député de l’opposition estime qu’une telle mesure aurait dû avoir l’aval de l’assemblée nationale puisque l’isolement qui en découle n’épargne personne.
La France a trouvé un défenseur de poids dans la crise qui l’oppose au gouvernement Comorien depuis deux semaines. L’avocat et homme politique comorien, ancien ministre des affaires étrangères, Me Mzimba, est entré dans le débat en dénonçant fortement et publiquement la position des autorités comoriennes en cet instant de ce conflit. Le seul député de l’opposition à l’assemblée nationale s’inscrit donc en porte-à-faux avec la position gouvernementale qui demande à la France d’identifier les personnes qui seront refoulées à Mayotte avant de les faire venir au pays. « C’est une politique suicidaire. L’essentiel n’est pas d’engager une guerre mais de la gagner. Il s’agit d’une politique agressive contre un partenaire important et paralysant les intérêts mêmes des Comores », déplore le juriste. La décision de la partie comorienne de demander des pièces d’identité aux frontières est considérée par Me Mzimba comme une entrée en guerre. « Ce gouvernement nous a conduit dans un état de guerre car personne ne peut bouger de ce pays. Les Comoriens ne peuvent pas aller non seulement en France mais aussi en Europe et dans certains pays africains », regrette l’élu de la circonscription de Ngouwengwé dans le Badjini.
L’avocat compare cette situation à un « rideau de fer » qui empêche les Comoriens de circuler, une sorte de nouveau visa qu’il a baptisé « visa Sambi » par analogie au « visa Balladur », imposé par la France en 1995 pour se rendre à Mayotte, à la différence que « le visa Balladur tue les volontaires qui veulent aller dans un territoire comorien mais le visa Sambi emporte tout le monde car tous les Comoriens sont privés du droit circuler », martèle Me Mzimba Pour cet ancien ministre des affaires étrangères, « comme à travers la décision du gouvernement, le pays est entré en guerre, une consultation de l’assemblée nationale était nécessaire avant ».
Et face de ce qu’il considère comme le « fonds de commerce des dirigeants politiques qui leur permet de tromper le peuple », l’avocat ne compte pas rester les bras croisés. Il entend déclencher « une pétition populaire pour lutter contre le Visa Sambi afin d’obtenir la libre circulation des personnes et des biens ». Et pour que la France rouvre sont consulat, Me Mzimba envisage de saisir Paris en tant que parlementaire « pour les implorer de délivrer des visas à tous les citoyens comoriens ».
Celui qui revendique le retrait de la question de Mayotte à l’Onu propose de suivre le conflit à la chinoise. « On doit prendre en compte la dimension humaine dans ce conflit. Prendre contact avec les Mahorais. Et comme dans le cas chinois, ce sont les Mahorais qui vont demander le départ des Français », conclut le parlementaire.

  • Comores / Mayotte - Accord sur les reconduites et les visas
    Par Annette Lafond
    Malango Actualité (2 avril)

Le ministère comorien de la défense avait décidé le 15 mars dernier qu’une pièce d’identité était exigée « à tout passager empruntant un avion ou un bateau à l’entrée comme à la sortie des postes frontaliers des Comores pour des raisons de sécurité ». Ce qui équivalait à un arrêt de reconduite à la frontière depuis Mayotte, puisque plusieurs étrangers démunis de papier avaient été refoulés. Le message était d’ailleurs passé à Mayotte où les comoriens en situation irrégulière s’étaient défaits de leur papier.
Mesure vraisemblablement prise en représailles de la proche départementalisation de Mayotte, elle avait aussitôt eu sa contrepartie avec l’arrêt de délivrance de visas à destination du territoire français pour les officiels comoriens dans un premier temps, avant d’étendre cette mesure à tous les ressortissants comoriens.
Après plusieurs jours de discussions, un accord vient d’être trouvé entre la France et les autorités comoriennes. Dès lundi, les visas seront de nouveau délivrés, alors que reprendront les premières reconduites à la frontière par bateau ou en avion. L’accord soutient la demande comorienne que les reconduites se fassent en respect des droits des personnes, ainsi que des conditions d’hébergement décentes au Centre de Rétention administrative.


Commentaires comoriens

Mayotte est un sujet complexe, tout le monde le reconnait. Le maillon faible de la question a toujours été, depuis 1975, la complaisance de l’Etat comorien devant les agissements de l’ancienne puissance coloniale. L’Etat comorien ne s’agite qu’à l’approche d’une assemblée générale de l’Onu, pour rassurer l’opinion nationale de l’inscription de la question à l’ordre du jour. Les Assemblées passent et le litige est toujours remis à l’Ag suivante, souvent à la demande des Comores, pendant que le statut de l’île de Mayotte n’a cessé d’évoluer, jusqu’à se transformer en département français.
Une étape importante risque encore une fois d’être franchie, celle de transformer Mayotte en région ultrapériphérique, impliquant, cette fois-ci, l’adhésion de l’Europe à la cause néocoloniale, alors que plus d’une vingtaine des pays européens avaient voté la première résolution admettant les Comores au sein des Nations unies et condamnant le référendum français dans l’île et toutes les consultations ultérieures. Le temps a passé, les générations qui sont aux commandes en Afrique et en Europe aussi.
Les Comores n’ont toujours pas de feuille de route connue et aucun kopeck n’est mobilisé pour la cause. Si avec le ministre Fahami, le discours a changé, devenu plus incisif, les déclarations plus claires sur les questions sous-jacentes comme le visa Balladur et les expulsions, les décisions courageuses tardent à être prises comme celle de refuser les expulsions qui nous rendent complices de déplacement forcé de populations. Absence de décisions courageuses

Ce mois-ci, quelques chose est en train de changer à Mayotte. Définitivement peut être. A l’appel de nombreuses associations, une grande manifestation est prévue à Mayotte le mercredi 23 février en mémoire aux milliers des victimes en mer. Il s’agit pour la plupart de français de souche vivant à Mayotte, membres des associations. La manifestation risque de n’être qu’une affaire de blancs, écœurés et révoltés par les drames humanitaires qui se déroulent sous leurs yeux et dont est seul responsable l’Etat français. Personne ne peut dénombrer les accidents de Kwasas chaque année, comme personne n’a de chiffres exacts du nombre des victimes. Le recensement réalisé en 2002 par un collectif d’associations présentes à Anjouan, chiffrait à 17 accidents et 407 victimes, dont 183 morts ou disparus, 224 rescapés entre juillet 2000 et février 2002.
Depuis, les chiffres pris en compte ne sont relevés que sur les accidents enregistrés près des côtes mahoraises. Silence coupable En juin 2010, le bilan de la préfecture de Mayotte, dénombre 126 Kwassas interceptés au premier semestre, avec au total 3201 passagers. Triomphalement, la préfecture explique que “ces résultats ont été rendus possibles grâce à l’action conjuguée de la police aux frontières (Paf), de la gendarmerie, de la gendarmerie maritime, des douanes et de la marine nationale’’.

Les contrôles quotidiens effectués par les forces de sécurité sur le territoire de Mayotte ont permis l’interpellation de 7321 Comoriens des trois îles, déclarés “en situation irrégulière“ sur le sol comorien, durant le 2ème trimestre 2010, soit un total de 12.321 personnes. En six mois, la France s’est rendue coupable d’interpellations et de déplacements de 10.010 personnes. Le silence et l’inaction des Comores rendent possible une telle politique. Mayotte couverte de radar, seule la côte sud de l’île en est exemptée. Cet itinéraire particulièrement risqué provoque des naufrages en série. A Kani-Kéli un naufrage avait tué neuf personnes dont cinq bébés. Les Comoriens des quatre îles n’avaient pourtant jamais eu de contrainte pour se rendre à Mayotte.
Depuis l’instauration d’un visa obligatoire, le fameux visa Balladur, du nom de son instigateur, les Comoriens des trois autres îles de l’archipel, empruntent la voie maritime, pour entrer incognito à Mayotte. On dénombre des milliers de comoriens qui ont péri en mer dont de nombreux bébés et des femmes enceintes. Désormais près de 26 000 expulsions sont programmées tous les ans dans des conditions inhumaines, par “la politique du chiffre“ proclamée par le gouvernement français.

Ahmed Ali Amir

L’ambassadeur de France à Moroni, Luc Hallade a menacé (dans un communiqué de presse, s’il vous plaît), et passé à l’acte : il limite – plus que d’habitude serait-on tenté de dire – l’octroi de visas d’entrée en France aux Comoriens. Cette colère panique, le diplomate l’a attrapée parce que l’Etat comorien vient de prendre la décision de souveraineté – sans doute une des plus régaliennes qui soit pour un Etat – de refuser le passage à ses frontières à toute personne qui ne serait pas en mesure de justifier son identité. Tout simplement.
Une telle mesure aux frontières, tous les pays du monde l’ont prise. La France, elle-même, dépense des centaines de millions d’euros par an, juste pour s’assurer de l’identité des personnes qui désirent entrer sur son territoire ou en sortir ; et c’est tout à fait normal. Mais, voilà : selon toute vraisemblance, monsieur l’ambassadeur de France doit penser que cette normalité est un privilège qui sied à la seule France et que, donc, tout autre pays qui en use, surtout s’il est plus petit et plus faible que le sien, doit être “sanctionné” au pied levé.

Le visa selon Hallade
Son excellence Hallade est d’autant plus sorti de ses gongs que la décision souveraine comorienne est susceptible d’empêcher la force coloniale d’occupation de son pays de continuer à opérer, annuellement, en toute aise et quiétude, les rafles de plusieurs milliers de Comoriens sur un sol qui est leur de par le droit, l’histoire, la civilisation et la culture. Les raisons à l’origine de la colère diplomatique française ne sont pas seulement incroyables et d’un autre temps. Elles sont, avant tout, contraires à la genèse et à la signification même du “visa” cet important acquis collectif des Nations et des peuples dans leur désir incompressible, depuis la nuit des temps, de communiquer, de se voir et de se mélanger.
Autant de gages pour la compréhension et la tolérance nécessaires pour donner toutes les chances à la chose la plus unique que, collectivement, tous les peuples et les Nations ont eu et auront toujours de plus chère au monde : la paix.

Un visa pour notre âme
Mais, manifestement, telle est loin d’être la signification que monsieur Hallade accorde à ce précieux acquis.
En effet, pour Luc Hallade, le visa c’est tout simplement un outil pour obtenir la servitude des plus petits peuples, une arme pour inciter ces peuples et ses dirigeants à cesser de défendre leurs propres intérêts nationaux pour laisser libre cours à ceux de son pays aussi anachroniques, aussi brutaux et illégaux soitils ; un moyen d’obtenir la trahison des autres peuples et de leurs dirigeants contre leur Nation et leurs peuples ; une monnaie destinée à acheter nos âmes, une monnaie d’échange pour la servitude ad viternam aeternam.
Désormais, nous savons pourquoi, sous les bas-fonds de la chancellerie de l’ancien Boulevard de Strasbourg, les visas pour le pays des droits de l’homme ne sont livrés que sur la présentation express de petits mots émanant des seuls “amis”, des aspirants “amis” et des petits apprentis “amis” comoriens de la France.
Des “amis de la France” qui savent, désormais après le communiqué de monsieur Hallade, pourquoi on leur livre, à eux, les yeux fermés, des visas par pelletés entières, alors qu’on en refuse un seul aux étudiants, aux artistes ou à celles et ceux qui, tout simplement, désirent aller faire un coucou à la Tour Eifel.

Madjuwani Hassane
madjuwani@gmail.com
Source : Al-watwan N° 1723 du jeudi 24 mars 2011


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Crise franco-comorienne : de qui se moque-t-on ? Entrevue avec le préfet de Mayotte