Dans sa délibération n°2010-87 du 1er mars 2010, la Halde dénonce les discriminations et les atteintes graves au droit à la santé à Mayotte, territoire où la législation et les pratiques sont très différentes de celles existant en métropole et dans les DOM. Elle « conclut au bien-fondé des affirmations de discrimination dans l’accès aux soins des étrangers en situation irrégulière et de leurs enfants ainsi que des mineurs étrangers en situation irrégulière ainsi que des mineurs étrangers isolés résidant à Mayotte ». Elle demande aux autorités « de mettre en place l’AME [aide médicale d’État] ou une couverture médicale équivalente à Mayotte (…) sans attendre la départementalisation » et, étant donnée « la violation manifeste des stipulations de la Convention internationale des droits de l’enfant (…) à ce que les enfants dont les parents se trouvent en situation irrégulière ainsi que les mineurs isolés bénéficient d’une affiliation directe à la sécurité sociale ». Dans l’attente de ces mesures, elle demande en urgence « une circulaire à destination du Centre hospitalier de Mayotte et de l’ensemble des structures de soins » permettant un accès effectif aux soins, en particulier pour tous les enfants mineurs et les femmes ayant besoin de soins pré et post-nataux.
La situation à Mayotte est dramatique alors même que des maladies infectieuses et transmissibles ou liées à la pauvreté y sont présentes. Près d’un tiers de la population est privé de toute protection maladie et, à l’exception de certaines situations d’urgence, de tout accès aux soins. Nombreux sont en outre ceux que les incessantes interpellations dissuadent de se rendre vers un centre de soins.
Les associations signataires se félicitent de cette délibération très attendue qui répond à une saisine inter-associative du 22 février 2008 [1] ainsi qu’à plusieurs des griefs dénoncés dans une autre saisine du 30 janvier 2009 [2]. Cette saisine constitue un dossier très complet sur ce sujet et comporte treize demandes. Elle fait suite aussi à plusieurs réclamations individuelles concernant des enfants gravement malades. Par ailleurs, la Halde reste saisie en ce qui concerne Mayotte de cas de discriminations en particulier en matière de prestations familiales, d’aide sociale à l’enfance et d’accès à l’éducation.
Cette délibération confirme et complète les décisions d’autres autorités, telles la Défenseure des enfants, le Comité européen des droits sociaux [3] et le Conseil d’État [4]. Cette délibération vient également à la suite des recommandations du Conseil économique, social et environnemental et des observations du Comité des Droits de l’enfant de l’ONU.
Les constats sur la situation insupportable à Mayotte tant au regard des questions de santé publique qu’au regard du droit fondamental à la santé n’ont cessé de s’accumuler et convergent tous sur l’urgence à changer la situation. Les recommandations de la Halde doivent être rapidement suivies d’effets.
Paris et Mamoudzou, 22 mars 2010
Signataires
Collectif Mom (ADDE, AIDES, Anafé, CCFD, la Cimade, Collectif Haïti de France, Comede, Gisti, Elena, Ligue des droits de l’homme, Médecins du monde, Mrap Secours Catholique / Caritas France)
Collectif Migrants Mayotte (Comité pour la concorde, la convivialité et la paix, Cimade à Mayotte, Médecins du Monde à Mayotte, Solidarité Mayotte)
CFDT santé du centre hospitalier de Mayotte
Quelques échos dans la presse
- AFP : Le droit à la santé est bafoué à Mayotte, selon deux collectifs associatifs, 22 mars
- Malango actualité - La Halde dénonce la discrimination dans l’accès aux soins par Eric Trannois, 22 mars
- Clicanoo, journal de l’île de la Réunion - Droit des étrangers : l’État cloué u pilori par la Halde,
24 mars - Le quotidien de la Réunion, 24 mars