Prolongation de la rétention : le JLD dispose d’un délai de 48 heures pour statuer sur la requête du préfet (24 heures à Mayotte)

Modification prévue par le projet de loi immigration-asile du 21 février 2018
lundi 5 mars 2018

Article L. 552-1 (modifié par l’art. 16, 2° du projet de loi)

Le juge des libertés et de la détention est saisi dans les quarante-huit heures suivant la notification du placement en rétention aux fins de prolongation de la rétention au-delà de cette durée. Il statue dans les quarante-huit heures suivant sa saisine par ordonnance au siège du tribunal de grande instance dans le ressort duquel se situe le lieu de placement en rétention de l’étranger, sauf exception prévue par voie réglementaire, après audition du représentant de l’administration, si celui-ci, dûment convoqué, est présent, et de l’intéressé ou de son conseil, s’il en a un. L’étranger peut demander au juge des libertés et de la détention qu’il lui soit désigné un conseil d’office. Si une salle d’audience attribuée au ministère de la justice lui permettant de statuer publiquement a été spécialement aménagée à proximité immédiate de ce lieu de rétention, le juge statue dans cette salle.
Il informe sans délai par tous moyens du sens de sa décision le tribunal administratif saisi le cas échéant par l’étranger d’un recours dirigé contre la mesure d’éloignement qui le vise.

A Mayotte seulement le juge continue à devoir se prononcer dans les 24 heures suivant sa saisine (art. 38, 18° du PJL).

Remarquons que vu les dispositifs particuliers qui permettent l’exécution de l’éloignement en un temps record, en Guyane, en Guadeloupe et, plus encore, à Mayotte (en moyenne 17H), l’allongement de ce délai est une mauvaise nouvelle en Guyane et en Guadeloupe puisque le contrôle de la régularité de la rétention par le JLD s’y exercera plus rarement.
A Mayotte, ce contrôle disparaîtrait complètement avec cet allongement.


Avis

A. Conseil d’État, Assemblée générale, 15 février 2018, n° 394206, avis sur le projet de loi immigration-asile du 21 février 2018

73 - "Au regard des particularités de la situation migratoire dans ces territoires, ces adaptations sont justifiées et conformes à ce qu’autorisent les dispositions constitutionnelles".

B. Exposé des motifs

Le 4° du I écarte à Mayotte l’application des dispositions prévues au 2° de l’article 16 visant à permettre au juge des libertés et de la détention de statuer dans un délai de quarante-huit heures sur la requête préfectorale aux fins de prolongation de la rétention, afin que le juge ne puisse statuer au-delà du septième jour de la rétention, délai proscrit par le Conseil constitutionnel.

C. Étude d’impact

2.4.3, p.108 - Afin de tenir compte de la pression migratoire exceptionnelle qui s’exerce sur Mayotte, la loi n° 2017-256 du 28 février 2017 de programmation relative à l’égalité réelle outre-mer et portant autres dispositions en matière sociale et économique a rétabli à cinq jours
la durée de la phase initiale de rétention administrative à l’expiration de laquelle est saisi le juge des libertés et de la détention aux fins de prolongation de la rétention.
Dans ce contexte, le délai ouvert au juge pour se prononcer est maintenu à 24 heures à Mayotte, afin d’assurer la conformité à la décision 79-109 DC du 9 janvier 1980 [1] , qui proscrit une intervention du juge au septième jour de la rétention.


[1Conseil constitutionnel, 9 janvier 1980, décision 79-109 DC, considérant 4 : « Considérant, toutefois, que la liberté individuelle ne peut être tenue pour sauvegardée que si le juge intervient dans le plus court délai possible ; que, s’il en est ainsi dans le cas prévu à l’article 3 de la loi qui subordonne à la décision du juge le maintien, au-delà de quarante-huit heures, de l’intéressé dans les locaux où il est retenu, il n’en va pas de même dans le cas prévu à l’article 6 de la loi dès lors que, dans cette dernière éventualité, l’intervention du juge n’est déclarée nécessaire que pour prolonger, au-delà de sept jours, le régime de détention auquel l’étranger est soumis ;
qu’ainsi, du fait qu’il prévoit que la personne expulsée, en application des dispositions du 1 au 4 du dit article 23, peut être maintenue en détention pendant sept jours sans qu’un juge ait à intervenir, de plein droit ou à la
demande de l’intéressé, le sixième alinéa de l’article 23 de l’ordonnance du 2 novembre 1945, tel qu’il résulte de l’article 6 de la loi soumise au Conseil constitutionnel, n’est pas conforme à la constitution ; »