Novembre meurtrier pour les migrant-e-s haïtien-ne-s de la Caraïbe

jeudi 28 novembre 2013

P-au-P, 28 nov. 2013 [AlterPresse] --- Environ une quarantaine d’Haïtiens et d’Haïtiennes ont perdu leur vie au cours de la dernière semaine du mois de novembre 2013, dans des circonstances différentes, mais avec un point d’entrée : la fuite de la triste réalité de leur pays natal, où les autorités se révèlent incapables d’endiguer la misère, le chômage et l’insécurité, relève l’agence en ligne AlterPresse.

Naufrage…la mer-cimetière

Les requins et autres animaux du fond des mers se sont régalés du corps de 30 de compatriotes, disparus au large des côtes de Stanley Cay, dans l’archipel des Bahamas, le lundi 25 novembre 2013.

Venus majoritairement du Nord-Ouest d’Haïti, un département réputé appauvri, ils se sont embarqués sur une embarcation de fortune, en espérant vivre des jours meilleurs à l’étranger, comme des milliers d’autres ont tenté ou ont réussi avant eux.

Le président de la république, Joseph Michel Martelly, qui se dit « attristé par la disparition », « profondément affecté par ce drame », ne fait que « déconseiller les citoyens de s’aventurer en haute mer dans des embarcations de fortune ».

Pour en finir avec « ces pratiques dangereuses », il sort son refrain « investissement et création d’emplois », harmonisé avec son slogan fétiche « Haiti is open for business ».

Quand les libertés publiques et les acquis démocratiques sont en danger et des milliers de personnes manifestent dans la rue pour exiger la démission de Martelly, comme le déplore le président de l’assemblée nationale, le sénateur Simon Dieuseul Desras, est-il opportun de penser à la concrétisation de tels objectifs ?

Quand l’exécutif se fait « présidentiel », la cacophonie ne s’instaure-t-elle pas comme partition à la tête de l’État ?

La machette, puis le feu en République Dominicaine

Les mânes de 4 à 8 Haïtiens se retournent sous la terre par les morsures des vermines. Ils ont été hachés par la machette, puis brulés par des Dominicains entre le 22 et 23 novembre 2013.

A la base : un couple de dominicains tués dans la province de Neyba.

Par le biais du ministère des Haïtiens vivant à l’étranger (Mhave), le gouvernement du premier ministre Laurent Salvador Lamothe affirme condamner « énergiquement la répétition d’actes xénophobes indiscriminés contre la communauté haïtienne en République Dominicaine »,. dans un communiqué en date du 24 novembre 2013.

Qui sont-elles, les personnes assassinées ?

Des paysans, non encadrés, de Cornillon/Grand Bois, en quête d’opportunités de travail. Leur travail agricole n’arrive pas à fertiliser le sol.

Le programme d’assistance sociale Ede Pèp du gouvernement, qui se frappe la poitrine « fòk pèp la jwenn », ne comporte-t-il pas une composante « kore peyizan » ?

Le kit d’intrant agricole de 1,500.00 gourdes (US $ 1.00 = 45.00 gourdes ; 1 euro = 62.00 gourdes aujourd’hui), accordé aux ménages vulnérables avec un chef de ménage, semble ne pas valoir grand-chose.

Assassinat d’un professeur d’université et d’un employé du sénat

73 ans, toute une vie dédiée à l’enseignement dont une bonne partie à l’Université d’État d’Haïti (Ueh) : le professeur émérite Jean Roland Lucien a été fauché par les balles de bandits à motos, le vendredi 15 novembre 2013, alors qu’il venait de retirer une somme de 30 mille gourdes dans une banque de la capitale,.

Le professeur Lucien n’avait pas un statut de temps plein à l’Ueh [à l’Institut national d’administration, de gestion et des hautes études internationales (Inaghei)], où il enseignait.. . L’État haïtien n’a jamais augmenté, significativement, le budget de l’Ueh, qui regorge de professeurs avec des salaires de misère allant jusqu’à 26 mille gourdes pour une session de (4 à 5 mois).

Et l’insécurité regagne du terrain, depuis plusieurs semaines dans la capitale haïtienne.

Auparavant, le 4 novembre (à la veille de l’interpellation, le mardi 5 novembre 2013, au sénat de la république, de 3 ministres du gouvernement), un agent de sécurité rapprochée du sénateur John Joël Joseph, passé à l’opposition depuis quelques temps, a été tué par balles.

Le vendredi 15 novembre 2013, Inorel Delbrun, cameraman attaché au service du président du sénat, perd sa vie sous les balles de bandits qui l’ont dépouillé de son matériel de travail. . Selon un de ces collègues, il aurait été l’un parmi les très rares caméramen à immortaliser l’image de l’arrestation « illégale et arbitraire » de Me André Michel, dans la soirée du 22 octobre 2013, au moment où les policiers ont lancé du gaz lacrymogène pour évacuer la foule et « prendre l’avocat de force » dans sa voiture.

Homme d’église comme de simples riverains de Cité Soleil

Serléus Simon, 59 ans, pasteur président de l’Union évangélique baptiste d’Haïti (Uebh), a été enlevé de sa résidence par des bandits, le vendredi 22 novembre 2013, pour être, ensuite, retrouvé assassiné dans un champ de maïs, à Pernier (à l’est de la capitale). . Dans la nuit du jeudi 21 au vendredi 22 novembre 2013, Jude Raymond et Jean Yonel Jean-Pierre sont tombés sous les balles d’inconnus armés dans le quartier « Trois Bébés » de la commune de Cité Soleil (au nord de la capitale). . Dans la dernière quinzaine de novembre 2013, l’insécurité au pays, la xénophobie en république voisine et le naufrage en haute mer ont ôté la vie à plusieurs Haïtiennes et Haïtiens.

Quelle sera la réponse des institutions nationales face à ces nouveaux drames inquiétants pour la population ?


Haïti-Conjoncture : Deuxième moitié de novembre 2013 meurtrière pour la république