Sénat : la question foncière à Mayotte (JO du 1 septembre 2011)

Question écrite n° 14201 de M. Soibahadine Ibrahim Ramadani et réponse
jeudi 1er septembre 2011

Question écrite n° 14201 de M. Soibahadine Ibrahim Ramadani (Mayotte - UMP) publiée dans le JO Sénat du 01/07/2010 - page 1669

M. Soibahadine Ibrahim Ramadani attire l’attention de M. le ministre d’État, ministre de l’écologie, de l’énergie, du développement durable et de la mer, en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat, sur l’épineux problème du foncier à Mayotte. Les dégâts causés par la tempête Xynthia et les conséquences malheureuses des inondations dans le Var doivent attirer notre attention sur le cas de Mayotte, territoire compris entre, d’une part, des zones à risques naturels de glissements de terrain et de chutes de blocs, intéressant 60 % du territoire, pour une large part non constructibles en l’état selon l’Atlas du bureau de recherches géologiques et minières (BRGM) et, d’autre part, la zone dite « des cinquante pas géométriques » appartenant au domaine public maritime de l’État, en partie occupée ou en voie de l’être sans garantie juridique. Entre les deux zones, plusieurs milliers d’hectares de terrain relèvent de l’indivision, ce qui représente une incitation aux constructions illégales sous la pression de la pénurie de logements.

Pour ces raisons et face aux dangers auxquels Mayotte est exposée, il lui demande : la mise en place urgente d’un plan de prévention des risques naturels (PPRN) en lieu et place de l’Atlas du BRGM, dépourvu de toute valeur juridique et réglementaire, afin de prévoir les zones à risques de glissements de terrain et de chutes de blocs ; l’extension à Mayotte de la compétence du groupement d’intérêt public chargé de l’indivision, prévu par la Lodeom (loi n° 2009-594 du 27 mai 2009 pour le développement économique des outre-mer) ; l’envoi d’une mission de l’Inspection générale de l’administration afin d’étudier la possibilité d’appliquer à Mayotte la loi n° 96-1241 du 30 décembre 1996 relative à l’aménagement, la protection et la mise en valeur de la zone dite des cinquante pas géométriques dans les départements d’outre-mer, dans le cadre de l’application des deux décrets du 9 septembre 2009.

Réponse du Ministère de l’écologie, du développement durable, des transports et du logement publiée dans le JO Sénat du 01/09/2011 - page 2279

Le territoire de Mayotte est exposé à plusieurs risques naturels. Les récents changements institutionnels lui permettent de bénéficier désormais des textes et des moyens qui s’appliquent dans les départements d’outre-mer en matière de prévention des risques naturels. L’État engage ainsi des actions de prévention, mais aussi des actions sur le foncier et sur les cinquante pas géométriques. Ainsi, les services de I’État mettront en place un programme de prévention des risques naturels comprenant des actions : de connaissance des aléas et des enjeux et de la vulnérabilité en général ; d’observation et, suivi des phénomènes ; d’information préventive ; de prise en compte dans l’urbanisme et l’aménagement et de réglementation dans les secteurs d’aléas forts et de menaces pour les vies humaines ; de réduction de la vulnérabilité des biens exposés par des mesures sur l’aléa, des actions de renforcement du bâti existant, des mesures de sauvegarde et des travaux de protection ; des dispositions de préparation à une éventuelle crise par des plans de sauvegarde et une bonne implantation des services d’intervention ; des évaluations des catastrophes par le retour d’expérience. C’est donc un programme global qui s’appuie sur les plans de prévention des risques naturels, outils essentiels de la politique de prévention élaborés afin de réduire les dommages en cas de catastrophe. Le ministère de l’écologie, du développement durable, des transports et du logement (MEDDTL) a également engagé des plans et des programmes de prévention qui pourront être déployés, le cas échéant, sur l’île de Mayotte : programmes d’actions de prévention des inondations (PAPI), plan de submersion rapide, plan séisme.

Plus précisément, l’engagement particulier du Grenelle de l’environnement sur la prévention des risques naturels en outre-mer conduit à des programmes d’actions spécifiques dans chacun des départements d’outre-mer. À Mayotte, les services de l’État ont entrepris sans attendre un programme de prévention qui passe par l’élaboration des plans de prévention des risques naturels (PPRN) sur toutes les communes. La priorité sera donnée aux territoires présentant le plus d’enjeux et les aléas les plus forts. Ces PPRN devront prendre en compte tous les risques, notamment les inondations, submersions marines, glissements de terrain et chutes de blocs. Dix PPRN ont déjà été prescrits à Mayotte (Mamoudzou, Dzaoudzi, Pamandzi, Koungou et Sada le 18 décembre 2009 - Acoua, Bandraboua, Chiconi, Dembéni et M’Tzamboro le 10 mai 2010). Outre les aléas hydrauliques et géologiques, ces PPRN intégreront l’impact global des cyclones (vents) et la mise en Suvre des mesures parasismiques. Un règlement de référence a été élaboré, il pourra être adapté, à la marge, à la spécificité de chaque commune. Pour les cinq premiers PPRN, la phase d’élaboration de la cartographie des risques a été lancée. Leur approbation devrait être effective en 2012. Les procédures d’information préventive sont également engagées. Suite à la réalisation par la préfecture d’un dossier départemental des risques majeurs (DDRM), il va être demandé à chaque commune d’élaborer son document d’information communale sur les risques majeurs (DICRIM) à partir des informations transmises par les services de l’État et avec leur assistance.

Enfin, les mesures d’information des acquéreurs et locataires vont être mises en Suvre, notamment en ce qui concerne l’information sur la nouvelle réglementation parasismique (arrêté ministériel du 22 octobre 2010, récemment modifié par l’arrêté ministériel du 19 juillet 2011). Celle-ci sera complétée des autres risques dès la connaissance précise du zonage des risques et des prescriptions des autres aléas des PPR. Par ailleurs, le groupement d’intérêt public (GIP) de reconstitution des titres de propriété sera chargé de rassembler tous les éléments propres à reconstituer les titres de propriété en outre-mer pour les biens fonciers ou immobiliers qui en sont dépourvus. Cette mission consiste, à la demande de propriétaires privés et propriétaires publics (collectivités et organismes publics), à réunir dans une base de données des informations disparates détenues par les principaux acteurs du domaine foncier et immobilier. Seront ainsi collectées par le GIP les données issues des recherches généalogiques, les documents d’arpentage établis par les géomètres, les informations tirées des actes constitués par les notaires, les données cadastrales et hypothécaires, les données obtenues par numérisation et indexation des documents conservés aux archives publiques ou privées.

La loi n° 2009-594 du 27 mai 2009 pour le développement économique des outre-mer n’a pas envisagé de créer un tel organisme à Mayotte, compte tenu de la complexité de la problématique foncière locale. La création d’un GIP de reconstitution des titres de propriété est envisageable à terme quand la situation foncière du département sera à même de réunir les conditions nécessaires à la mise en Suvre de cette structure.

Enfin, la collectivité départementale de Mayotte dispose d’un régime spécifique sur les cinquante pas géométriques, issu de la loi n° 2007-224 du 21 février 2007 portant dispositions statutaires et institutionnelles relatives à l’outre-mer et qui a fait l’objet de deux décrets d’application en date du 9 novembre 2009, qui autorisent, sous certaines conditions, la cession de parcelles sur cette zone. Une mission s’est récemment rendue à Mayotte pour étudier la possibilité de créer un établissement public foncier qui pourrait, le cas échéant, être également chargé d’une mission sur les cinquante pas géométriques.

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