Une Note de l’IEDOM
Cette note constitue le troisième et dernier volet du projet d’analyse des échanges régionaux des DOM et COM. Elle est centrée sur les échanges commerciaux de La Réunion et de Mayotte dans l’océan Indien.
Les deux premières études « Échanges régionaux de la Nouvelle-Calédonie et de la Polynésie française » et « Échanges régionaux des départements français d’Amérique » ont été publiées respectivement en janvier et juillet 2011.
Analyse publiée par le Journal de Mayotte, 30 mai 2014
L’objectif de l’étude menée par l’IEDOM Paris est d’identifier les facteurs de frein et les éléments moteurs des échanges régionaux des départements de l’océan Indien, La Réunion et Mayotte.
Avec un premier constat : les deux départements partagent avec tous leurs proches voisins la caractéristique de l’insularité. De plus, Maurice, les Seychelles et les Comores sont des marchés étroits du fait de leur taille, et Madagascar et l’Union des Comores présentent un faible niveau de PIB (Produit Intérieur Brut, richesse d’un pays).
C’est une première explication, pour les auteurs, des échanges commerciaux régionaux peu développés. Un biais donné par le modèle (modèle de gravité) utilisé pour l’étude qui établit que les échanges commerciaux qui ont lieu entre deux économies sont proportionnels à leur richesse (PIB) et, au contraire, freinés à mesure de la distance qui les sépare.
La mère nourricière
Donc, l’éloignement des deux départements par rapport au reste du monde est un frein aux échanges commerciaux, mais il devrait favoriser les échanges intrarégionaux selon ce modèle. Or, il n’en est rien, sur la période 2002-2011, 8% des exportations réunionnaises vont vers Mayotte, et à l’inverse, 1% des exportations mahoraises partent vers La Réunion. C’est la France, bien que très éloignées, qui demeure un partenaire privilégié des deux territoires, « 47% des importations à Mayotte ».
Un cas dans la région, « le lien des autres économies insulaires de la région avec leur ancienne métropole (Madagascar et les Comores avec la France, Maurice et les Seychelles avec le Royaume Uni) s’étant érodé avec le temps ».
Pourquoi cette particularité ? Le frein majeur aux échanges vient du deuxième constat : alors que les organisations régionales de commerce se développent un peu partout dans le monde, elles restent limitées dans notre région. On distingue trois principaux accords régionaux impliquant les pays du pourtour de l’océan Indien.
De l’utilité d’un eurodéputé
Quatre en réalité si l’on compte la Commission de l’Océan Indien à laquelle participe La Réunion, et qui intègre Madagascar, Maurice, les Seychelles et les Comores. Une COI qui « n’aurait pas contribué à créer un surcroît d’échanges avec ses membres » indique l’IEDOM, « en raison de difficultés liées à l’insularité » (mais c’est précisément pour quoi elle est créée) ou « des différences de niveaux de développement ou des crises politiques ».
Or, d’autres organisations régionales existent aux portes de Mayotte. Elles s’appellent COMESA (Marché commun de l’Afrique Orientale et Australe, créé en 1993 qui regroupe 20 Etats), SADC (Communauté de Développement de l’Afrique australe, 1979, 15 Etats dont l’Afrique du Sud) et ARC (Association des Etats riverains de l’Océan Indien, 1997). Ainsi, le site Malango actualité rapportait en juin 2013 que « les échanges commerciaux entre l’île Maurice et les pays membres du COMESA et de la SADC avaient enregistré des hausses pendant le premier trimestre 2013 ».
L’avenir de Mayotte devrait donc se conjuguer en africain. Les élus mahorais l’ont compris eux qui ont lancé le « Concept Canal du Mozambique ». Mais notre île aurait tout à gagner de profiter des organisations existantes pour commencer. D’autant que, du fait du rattachement des deux DOM à l’Union Européenne en tant que RUP, ils sont directement concernés par les négociations en cours entre l’UE et les pays Afrique-Caraïbes-Pacifique (pays ACP), avance l’IEDOM, sur des Accords de partenariats économiques.
Des accords qui sont toutefois moins avancés en Afrique qu’aux Caraïbes, et qu’il faudrait donc booster. Un challenge de taille, mais combien indispensable, pour nos fraîchement élus députés européens.
Anne Perzo-Lafond