Vers une égalité réelle pour les deux peuples autochtones français, les Amérindiens de Guyane et les Kanak de Nouvelle-Calédonie
Communiqué de presse
Paris, le 23 février
Au lendemain de l’adoption de la loi
pour l’égalité réelle des
outre-mer
que la Commission nationale consultative des droits de l’homme (CNCDH) salue, la CNCDH
souhaite apporter un éclairage sur la situation spécifique des peuples autochtones en
outre-mer et appelle l’Etat français à clarifier sa position en faveur de la reconnaissance de
ces peuples en tant que tels.
«
La loi
pour l’égalité réelle des
outre-mer constitue une avancée notable dans
l’engagement de la France à combler les retards dans l’accès aux droits des populations
vivant dans les territoires ultra-marins
. Néanmoins,
explique Christine Lazerges,
présidente de la CNCDH,
les membres des peuples k
anak en Nouvelle-Calédonie et
amérindiens en Guyane doivent faire l’objet d’une attention particulière. Afin que les
mesures prises en faveur de ces deux peuples soient réellement efficaces, il est
indispensable que l’Etat reconnaisse ces deux peuples comme des « peuples
autochtones » en tant que tels sur le territoire de la République française
.
»
Le cadre : une description des peuples autochtones apportée par les Nations unies
Les Amérindiens de Guyane et les Kanak de Nouvelle-Calédonie revendiquent un droit à l’autochtonie
en se reconnaissant dans une description apportée par les Nations unies
:
« Par communautés, populations et nations autochtones, il faut en
tendre celles qui liées
par une continuité historique avec les sociétés antérieures à l’invasion et avec les
sociétés précoloniales qui se sont développées sur leurs territoires, s’estiment distinctes
des autres segments de la société qui dominent à présent sur leur territoires ou parties
de ces territoires.
Elles constituent maintenant des segments non dominants de la société et elles sont
déterminées à préserver, développer et transmettre aux futures générations leurs
territoires ancestraux et leur identité ethnique qui constituent la base de la continuité de
leur existence en tant que peuples conformément à leurs propres modèles culturels, à
leurs institutions sociales et à leurs systèmes juridiques. »
Le principe d’indivisibilité de la République est
compatible avec la reconnaissance des
droits individuels et collectifs des peuples autochtones.
Convaincue que cette reconnaissance des peuples autochtones n’emporte pas une remise en cause
du principe d’indivisibilité de la République ni de l’universalité des droits de l’homme, la CNCDH
estime qu’elle est le préalable indispensable à l’effectivité des principes d’égalité devant la loi et de
non-discrimination.
La CNCDH
recommande donc
à la France de ratifier la
Convention n°169 relative aux peuples
indigènes et tribaux
de l’Organisation internationale du Travail de 1989, seul instrument juridique
contraignant assurant une véritable protection aux membres des peuples autochtones et consacrant
notamment
le droit collectif à la terre.
L’
efficacité des pol
itiques publiques est subordonnée à une pleine reconnaissance des
spécificités des peuples autochtones.
Les comités des Nations unies interpellent régulièrement l’Etat français sur les difficultés des peuples
autochtones à jouir pleinement des droits fondamentaux (difficulté d’accès
à l’état civil,
aux soins, à
l’éducation, aux
autres
services publics, défaut des infrastructures de communication et de transport).
L’insuffisante prise en compte de leurs spécificités, le non-respect de leur identité, de leur
culture, de
leur langue, de leurs tra
ditions sont à la source de
graves discriminatios.
Si la volonté des autorités
françaises au niveau national et
local de tenir compte des spécificités des
peuples autochtones est manifeste, le constat est mitigé quant à l’
efficacité des mesures prises en
leur
faveur, et l’adéquation du processus d’élaboration de celles-ci.
La CNCDH est convaincue qu’une reconnaissance
des difficultés propres rencontrées par l
es peuples
autochtones
est
une condition essentielle pour que la politique volontariste défendue par les pouvoirs
publics soit plus efficace et cohérente et respectueuses des peuples eux-mêmes.
L’Etat doit en particulier garantir le respect du droit de participer
à la prise de décision.
Les peuples autochtones
doivent
être consultés et associés aux décisions qui concernent leurs droits
et leurs
modes
de vie. La CNCDH recommande aux différentes autorités publiques, au niveau national
et local, de s’assurer que le droit à la participation soit effectivement recon
nu et systématiquement
mis en œuvre pour les Kanak et les Amérindiens.
A ce titre, en 1998, l’élaboration de l’Accord de
Nouméa, à laquelle les peuples Kanak ont été directement associés, a constitué une étape majeure.
Aujourd’hui, la CNCDH se félicite
des avancées que contient la loi
pour l’égalité réelle des
outre-mer
concernant par exemple le renforcement du rôle du grand
conseil coutumier (ancien Conseil
consultatif des populations
amérindiennes
et
bushinenge).
Etude
sur l’effectivité des droits da
ns les
outre-mer
L’avis sur les peuples autochtones ultramarins sera intégré dans une large étude sur l’effectivité
des
droits de l’homme dans les o
utre-mer. La CNCDH a décidé d’engager ce
travail collectif en vue de
produire un ouvrage qui dressera le
bilan de l’état
des droits de l’homme dans les outre-mer et
formulera des recommandations concrètes pour favoriser leur effectivité pleine et entière dans ces
territoires.
L’ouvrage sera publié au début de l’année 2018.