Le droit administratif doit être appliqué en Guyane

Deux décisions de la Cour administrative d’appel de Bordeaux
jeudi 3 décembre 2009

Cour administrative d’appel de Bordeaux,
n° 09BX00875, 3 décembre 2009

(...) Si, pour introduire valablement une demande de carte de séjour, il est nécessaire, sauf si l’une des exceptions définies à l’article 3 du décret du 30 juin 1946 (article R311-1 du Ceseda) est applicable, que les intéressés se présentent physiquement à la préfecture, le moyen tiré de la méconnaissance de la règle de présentation personnelle du demandeur en préfecture ne constitue pas un moyen d’ordre public que le juge administratif doit relever d’office ; qu’en soulevant d’office un tel moyen, sans en avoir au surplus informé la requérante, le Tribunal administratif de Cayenne a commis une erreur de droit  ; que, par suite, et sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens de la requête, Mlle A est fondée à demander l’annulation du jugement attaqué ;

Considérant qu’il y a lieu d’évoquer et de statuer immédiatement sur la demande de Mlle A devant le Tribunal administratif de Cayenne ;
Considérant qu’aux termes de l’article 5 de la loi du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs : (...) Une décision implicite intervenue dans des cas où une décision explicite aurait dû être motivée n’est pas illégale du seul fait qu’elle n’est pas assortie de cette motivation. Toutefois, à la demande de l’intéressé formulée dans les délais du recours contentieux, les motifs de toute décision implicite de rejet devront lui être communiqués dans le mois suivant cette demande (...) ; qu’il résulte de ces dispositions qu’en l’absence de communication des motifs dans le délai d’un mois, la décision implicite se trouve entachée d’illégalité ; qu’aux termes de l’article 19 de la loi du 12 avril 2000 : Toute demande adressée à une autorité administrative fait l’objet d’un accusé de réception (...). Les délais de recours ne sont pas opposables à l’auteur d’une demande lorsque l’accusé de réception ne lui a pas été transmis ou ne comporte pas les indications prévues ;

Considérant qu’il ressort des pièces du dossier que Mlle A a, le 15 février 2006, adressé au préfet de la Guyane, une demande de titre de séjour ; que si une attestation de dépôt lui a été remise en octobre 2006, il n’est pas établi qu’elle mentionnait le délai à l’issue duquel interviendrait une décision implicite ainsi que les délais et voies de recours ; que, dès lors, le délai de recours contentieux de deux mois ne pouvait lui être opposé ; que Mlle A a, le 23 avril 2008, demandé la communication des motifs de la décision implicite de rejet de sa demande d’admission au séjour ; que l’administration n’a pas communiqué ces motifs dans le délai d’un mois prévu par les dispositions précitées de l’article 5 de la loi du 11 juillet 1979 ; que, par suite, la décision implicite attaquée se trouve entachée d’illégalité ; qu’elle doit, dès lors, être annulée ;

Sur les conclusions à fin d’injonction :

Considérant, en premier lieu, que, compte tenu du motif de l’annulation de la décision implicite par laquelle le préfet de la Guyane a rejeté sa demande de titre de séjour en date du 15 février 2006, l’exécution du présent arrêt implique seulement que soit délivrée à l’intéressée une autorisation provisoire de séjour et que le préfet se prononce à nouveau, après une nouvelle instruction, sur la situation de Mlle A en ce qui concerne son droit au séjour ; (...)

DÉCIDE :

Article 1er : Mlle A est admise au bénéfice de l’aide juridictionnelle provisoire.
Article 2 : Le jugement du Tribunal administratif de Cayenne du 12 mars 2009 et la décision implicite par laquelle le préfet de la Guyane a rejeté la demande de titre de séjour de Mlle A en date du 15 février 2006 sont annulés.
Article 3 : Il est enjoint au préfet de la région Guyane de réexaminer la demande de Mlle A dans un délai d’un mois.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de Mlle A est rejeté.
Article 5 : L’Etat versera à Me Cesso, avocat de Mlle A, une somme de 1 000 euros en application des dispositions du deuxième alinéa de l’article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve qu’il renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l’État.

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Cour Administrative d’Appel de Bordeaux, n° 09BX01043, 3 décembre 2009

Décision rédigée dans des termes très voisins de la précédente.

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