Enfants haïtiens séparés de leur mère : urgence considérablement aggravée par la tragédie

CE, juge des référés, n° 333870/72 du 18 janvier 2010 et n° 334522 du 334522 du 2 février
mardi 2 février 2010

Deux suspensions d’un refus implicite de visa par la Commission de recours contre les décisions de refus de visas : la séparation d’une mère et de ses enfants est constitutive d’une situation d’urgence que les tragiques événements survenus en Haïti aggravent de manière considérable


(...) Considérant que Mme Rose A, ressortissante haïtienne née en 1963, est entrée en France en 2002 et a obtenu le statut de réfugié à la suite d’une décision de la commission des recours des réfugiés du 25 janvier 2005 ; qu’elle conteste les refus de visa opposés à ses demandes tendant à faire venir en France ses six enfants ;

Considérant que, si le lien de filiation avec l’un des enfants de la requérante n’est pas contesté, le refus opposé par l’administration se fondait sur le caractère apocryphe des actes produits à l’appui des demandes relatives aux cinq autres enfants de Mme A ; que des précisions complémentaires ont toutefois été apportées au cours de l’instruction des présentes requêtes et, en particulier, au cours de l’audience publique ; qu’outre des jugements d’authentification des actes d’état civil litigieux, la requérante a produit des certificats de baptême et justifié de versements réguliers d’argent à l’intention de ses enfants ; que le juge des référés a décidé, lors de l’audience publique, de prolonger l’instruction, afin notamment de permettre à l’administration de vérifier, comme elle souhaitait le faire, auprès des autorités religieuses l’authenticité des certificats de baptême produits au cours de cette audience ; que, si l’administration a commencé d’entreprendre des diligences à cette fin, elle n’a pas été en mesure d’indiquer, dans un délai raisonnable au regard des exigences propres aux procédures de référé, les conclusions qu’elle en tirait ; que, dans ces conditions, il résulte de l’ensemble des éléments de la procédure un doute sérieux, en l’état de l’instruction, quant au bien-fondé du motif tiré de l’incertitude du lien de filiation entre la requérante et cinq des six enfants ;

Considérant que la séparation entre Mme A et ses enfants est, dans les circonstances de l’espèce, constitutive d’une situation d’urgence, que les tragiques évènements survenus en Haïti aggravent de manière considérable ; (...)

O R D O N N E :
Article 1er : L’exécution des décisions implicites par lesquelles la commisison de recours contre les décisions de refus de visa d’entrée en France a rejeté les demandes de Mme A est suspendue.

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(...) Considérant que Mme B, ressortissante haïtienne née en 1970, est entrée en France en 2002 et a obtenu le statut de réfugié à la suite d’une décision de la commission des recours des réfugiés du 10 octobre 2003 ; qu’elle conteste le refus de visa opposé à sa demande tendant à faire venir en France ses deux filles ;

Considérant que le refus opposé par l’administration se fonde sur le caractère apocryphe des actes produits à l’appui des demandes ; que, cependant, il ressort des explications fournies en séance par Mme B qu’ayant dû quitter précipitamment Haïti, elle n’avait pas en sa possession les documents d’état-civil de ses enfants et que les documents produits à l’appui des demandes de visa l’ont été par une tierce personne ; qu’au cours de l’instruction, elle a produit de nouveaux actes de naissance délivrés en juin 2009 dont la signature a été légalisée ; que si la situation actuelle en Haïti ne permet pas de procéder à des recherches sur l’authenticité de ces documents, cette circonstance ne peut suffire à les écarter ; que, par ailleurs, Mme A avait mentionné en novembre 2003 l’existence de ses deux filles dans le dossier devant l’OFPRA, et qu’elle a justifié de versements réguliers d’argent à l’intention de ses enfants ; que, dans ces conditions, il résulte de l’ensemble des éléments de la procédure un doute sérieux, en l’état de l’instruction, quant au bien-fondé du motif tiré de l’incertitude du lien de filiation entre la requérante et ses deux filles ;

Considérant que la séparation entre Mme B et ses deux filles est, dans les circonstances de l’espèce, constitutive d’une situation d’urgence que les tragiques événements survenus en Haïti aggravent de manière considérable ;

O R D O N N E :
Article 1er : L’exécution de la décision implicite par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d’entrée en France a rejeté la demande de Mme A est suspendue.

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